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Comment la Médecine Traditionnelle Chinoise comprend-elle l’origine de la maladie ?


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Après une première introduction aux principes de la physiologie en Médecine Traditionnelle Chinoise, poursuivons aujourd’hui notre exploration avec une question essentielle : comment la MTC comprend-elle l’origine de la maladie ?

 Comprendre l’origine de la maladie en Médecine Chinoise

(avec quelques éclairages des textes anciens)


Dans notre culture moderne, on imagine souvent la maladie comme : un agent extérieur qui “attaque”, un symptôme qui apparaît, puis un traitement “contre” ce symptôme.


La Médecine Chinoise – comme l’explique Li Xin – propose une vision radicalement différente :

la maladie n’est pas un ennemi,

c’est un désaccord, une rupture d’harmonie dans la manière dont la vie circule en nous.


1. La maladie naît d’un déséquilibre dans la circulation du vivant

Les textes anciens disent :

「正氣存內,邪不可干。」“Lorsque le zheng qi (force correcte) est présent à l’intérieur, aucun facteur perturbateur ne peut nuire.” (Huangdi Neijing, Suwen).

Cela signifie : la maladie survient quand quelque chose se désaccorde en nous-même, bien avant l’arrivée d’une cause extérieure.

Pour la MTC, le corps n’est pas une machine : c’est un processus vivant, une respiration intérieure qu’on appelle Qi Ji (气机), la dynamique qui fait monter, descendre, ouvrir, fermer.( cf post sur la physiologie chinoise)

Quand cette respiration se dérègle, la maladie apparaît.


2. Trois dimensions doivent rester en harmonie

Li Xin résume très simplement :


A. La structure interne

la solidité du corps, des organes, des liquides, le « terrain ».


B. L’organisation psychique et émotionnelle

notre manière de réagir, d’intérioriser, de gérer les tensions.

Le Classique dit :

「百病皆生於氣。」“Toutes les maladies naissent du Qi (du mouvement interne).”

Autrement dit : notre façon de réagir à la vie influence autant le corps que l’inverse.


C. Le contexte environnemental

climat, alimentation, rythme de vie, chocs, charge mentale…

La maladie survient lorsque l’accord entre ces trois niveaux se rompt.


3. Les 4 formes de déséquilibre du Qi (Qi Ji).

Quand la dynamique du Qi s’altère, la MTC distingue quatre types de réactions :


  1. Qi Ni 气逆 – le Qi “s’inverse” → toux, agitation, reflux, colère explosive

  2. Qi Zhi 气滞 – le Qi stagne → lourdeurs, douleurs fixes, rumination

  3. Qi Xian 气陷 – le Qi “s’affaisse” → fatigue, ptoses, manque d’élan

  4. Qi Xu 气虚 – le Qi s’affaiblit → faiblesse, souffle court, frilosité

Ce sont simplement quatre manières différentes pour le corps de dire : « quelque chose ne circule plus correctement ».

Et oui : cela correspond totalement aux quatre mouvements fondamentaux de la vie décrits dans les classiques :

  • sheng 升 (monter)

  • jiang 降 (descendre)

  • chu 出 (sortir)

  • ru 入 (entrer)


4. La maladie n’est pas une “attaque” mais une rupture de dialogue

Dans cette vision :

  • La maladie n’est pas un intrus.

  • C’est un message du corps.

  • Ce message dit : “ma façon de circuler n’est plus juste pour ma vie actuelle.”

Le Neijing dit :

「有形之病,必由無形。」“Ce qui devient visible dans le corps vient toujours d’une cause invisible.”

La cause “invisible”, ce n’est pas du mysticisme : c’est le vécu émotionnel, la fatigue accumulée, le stress non digéré, le mode de vie, l’adaptation à l’environnement.


Illustration concrète : les trois vulnérabilités ou la rupture du dialogue.


Pour Li Xin ce sont ces trois vulnérabilités ou trois fragilités qui, si elles se cumulent, rendent l’organisme moins capable de s’adapter : 


1 La faiblesse de la structure — Jing 精


Le Jing, c’est la vitalité profonde, la matière première de notre constitution. Il ne s’agit pas de quelque chose de “mystique” : c’est la solidité du yin du corps —les os, le système de reproduction, la capacité à récupérer, la résistance.

Quand la structure est faible, on peut observer :

  • fatigue chronique,

  • inflammations à répétition,

  • vieillissement prématuré,

  • digestion ou sommeil qui se dérèglent facilement.

Le Neijing dit :

「精不足者,補之以味。」“Lorsque le Jing est insuffisant, on le nourrit par les saveurs (plantes, aliments)”.


2 Le défaut de dynamique — Qi Ji 气机


Le Qi Ji est, comme nous l'avons vu, la respiration fonctionnelle de la vie : monter, descendre, ouvrir, fermer.

Lorsque ce mouvement se trouble, il n’arrive plus à distribuer correctement chaleur, liquides, émotions, nutriments.

La MTC décrit alors quatre grandes réactions :

  • Qi Ni 气逆 : l’énergie s’inverse


    • Reflux acide, éructations, brûlures d’estomac.

    • Toux sèche irritante (le Qi de Poumon remonte au lieu de descendre).

    • Palpitations, sensation que “ça monte à la tête”.

    • Colère explosive ou irritable : le Qi du Foie jaillit vers le haut.

    • Vertiges soudains, chaleur au visage.

    • Migraine pulsatile liée à la montée du Yang.


  • Qi Zhi 气滞 : l’énergie stagne

    On ressent pression, tension, lourdeur.


    Exemples concrets :

    • Ballonnements après les repas, ventre “dur” ou tendu.

    • Épaules crispées, nuque raide, mâchoire serrée.

    • Soupirs fréquents pour “débloquer” la poitrine.

    • Râler, ruminer, ressentir frustration ou contrariété.

    • Règles douloureuses (le Qi n’avance pas).

    • Constipation “par tension”.


  • Qi Xian 气陷 : l’énergie s’affaisse

    Le Qi devrait maintenir, soutenir… mais il descend, manque de tonus .Cela donne lourdeur, ptôses, fatigue structurelle.

    Exemples concrets :

    • Fatigue chronique avec sensation que tout “pèse”.

    • Descente d’organe, prolapsus, hémorroïdes.

    • Lourdeur des jambes, difficulté à tenir debout longtemps.

    • Hypotension, vertiges en se levant.

    • Selles molles et “coupe faim” (Rate qui n’arrive plus à maintenir).

    • Voix faible, difficulté à projeter la parole.


  • Qi Xu 气虚 : l’énergie s’épuise

     Le Qi devrait donner de l’élan… mais il n’y en a pas assez.Résultat : fatigue, faiblesse, manque de chaleur.

    Exemples concrets :

    • Fatigue après le moindre effort.

    • Souffle court en montant les escaliers.

    • Manque de force dans les mains ou les jambes.

    • Frilosité, mains froides.

    • Digestion lente, peu d’appétit.

    • Immunité fragile, sensibilité aux infections.

    • Besoin de s’allonger pour récupérer.


Le Neijing le dit ainsi :

「百病皆生於氣逆。」“La plupart des maladies naissent d’un mouvement de Qi devenu contraire.”

Ainsi, quand la dynamique interne se détraque, le corps n’arrive plus à s’autoréguler —et la maladie apparaît facilement.


3 L’instabilité du Shen 神

Le Shen, c’est la clarté intérieure, notre capacité à sentir, percevoir, décider, se relier. Il s’exprime dans :

  • la qualité du sommeil,

  • l’humeur,

  • la capacité d’adaptation,

  • la stabilité émotionnelle.

Lorsque le Shen est instable :

  • les émotions débordent,

  • la fatigue psychique prend le dessus,

  • l’organisme perd son axe.

Les anciens disaient :

「神亂則病。」“Lorsque le Shen est troublé, la maladie s’installe.”

 Pour Li Xin, un Shen instable est souvent le premier indice qu’un décalage s’est produit ; l’agitation émotionnelle n’est alors que le signal visible que la respiration interne a déjà changé de rythme.


En résumé

La maladie n’est pas une attaque extérieure. Elle apparaît lorsque l’une de ces trois forces se fragilise : Jing (la structure), Qi Ji (la dynamique), Shen (la clarté psychique).

Et souvent, la fragilité commence bien avant le symptôme visible.

C’est une rupture d’harmonie, un désaccord entre ce que vit le corps, ce que traverse le cœur, et la manière dont nous vivons notre environnement.

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